A Propos de l’Arrêt du 30 janvier 2025 (Cass. 2e civ. 30-1-2025 n° 22-18.333 FS-B)…
La Cour de cassation a récemment jugé que n’entraient pas dans le champ d’application de l’article L 242-1, II, 7° du CSS excluant de l’assiette des cotisations de sécurité sociale, les sommes qui, bien qu’allouées à l’occasion de la rupture du contrat de travail, ont pour objet d’indemniser un préjudice, même si ces sommes ne sont pas au nombre de celles limitativement énumérées à l’article 80 duodecies du CGI.
Elle confirme l’arrêt d’appel qui lui est soumis.
L’arrêt d’appel retenait qu’il ressortait du protocole transactionnel que la somme allouée au salarié avait pour objet de réparer les préjudices, notamment moraux et professionnels, dont il entendait se prévaloir en raison des conditions dans lesquelles il avait exercé ses fonctions et avait été privé de son emploi.
Il en déduisait qu’elle avait pour objet de compenser le préjudice né des conditions d’exercice du contrat de travail et de sa rupture.
La cour d’appel a donc exactement déduit de ces constatations, procédant de son pouvoir souverain d’appréciation de la valeur et la portée de l’ensemble des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, et faisant ressortir que l’indemnité versée en exécution de la transaction ayant mis fin au litige ne constituait pas un élément de rémunération dû à l’occasion du licenciement du salarié mais présentait une nature indemnitaire, que l’indemnité versée ne devait pas entrer dans l’assiette des cotisations sociales pour son entier montant.
Ce faisant, elle confirme sa jurisprudence antérieure du 15 mars 2018 et les circulaires applicables.
Le Bulletin officiel de la Sécurité sociale a en effet intégré la jurisprudence de la Cour de cassation de 2018 dans sa doctrine :
« En dehors des indemnités pouvant être exclues de l’assiette des cotisations et contributions sociales dans les conditions prévues par la loi, une somme représentative de dommages-intérêts indemnisant un préjudice (moral ou personnel) autre que la perte de salaire peut dans certains cas être exclue de l’assiette des cotisations, lorsque l’employeur apporte la preuve qu’elle concourt, pour tout ou partie de son montant, à l’indemnisation d’un préjudice résultant de la rupture du contrat de travail du salarié.
Il en va ainsi lorsqu’une décision de justice constate la réalité de ce préjudice et considère que les sommes versées constituent des dommages-intérêts ».
L’Urssaf adopte la même solution, dans les termes suivants :
« Pour distinguer les sommes qui ont un caractère indemnitaire de celles qui ont le caractère de rémunération, le sens et la portée de la transaction peuvent être recherchés :
– à partir des termes mêmes du document transactionnel,
– mais aussi à partir des éléments extérieurs à cette transaction (circonstances de fait, relations entre les parties…).
L’Urssaf est ainsi compétente pour rechercher si l’indemnité transactionnelle versée correspond à une ou plusieurs indemnités susceptibles d’être exonérées, ou bien s’il s’agit d’éléments de salaire soumis à cotisations ».
Cette reconnaissance administrative renforce la sécurité juridique des praticiens en établissant des critères clairs pour l’exonération des indemnités transactionnelles.
Encore faut il soigner la rédaction de la transaction afin d’éviter la reconnaissance par le juge de l’indemnisation d’une rémunération, ou d’une indemnité visant précisément à compenser une absence de rémunération.
L’avocat du salarié, par précaution, exigera avant signature d’une transaction des précisions quant au traitement social et fiscal des indemnités négociées au titre de la transaction.
La rédaction portera ensuite sur la qualification précise des préjudices indemnisés au titre de la transaction.
Toutefois, les Urssaf seront toujours amenées à contrôler plus strictement la nature des préjudices indemnisés, leur qualification dans la transaction et l’existence d’éléments probants justifiant leur réparation.
La simple référence dans la transaction à l’existence d’un préjudice moral ne libèrera pas les parties de démontrer l’existence des éléments probants en accréditant l’existence.
De fait, les contestations relatives au montant des cotisations prélevées sur les indemnités transactionnelles risquent de se multiplier, les salariés étant désormais mieux armés pour contester les retenues opérées sur des sommes ayant un caractère indemnitaire.
Une rédaction prudente de la transaction demeure pour le salarié, et l’employeur, la meilleure des protections.