
Être cadre dirigeant ne se décrète pas, la qualification donnée aux fonctions du Cadre par l’employeur sont indifférentes sans rémunération adéquate à ce statut.
A propos de Cass. soc. 1er mars 2023, n° 21-19988 D
En droit, pour être considéré comme cadre dirigeant d’une entreprise, il faut remplir trois critères cumulatifs définis par le code du travail.
Sont en effet seulement considérés comme cadres dirigeants les salariés (c. trav. art. L. 3111-2) :
- assumant des responsabilités dont l’importance implique une « grande indépendance » dans l’organisation de leur emploi du temps ;
- détenant le pouvoir de prendre des décisions de façon « largement autonome » ;
- bénéficiant d’une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération en vigueur dans l’entreprise ou établissement.
Ces trois critères impliquent que seuls les cadres participant à la direction de l’entreprise relèvent de la catégorie des cadres dirigeants (cass. soc. 2 juillet 2014, n° 12-19759, BC V n° 174 ; cass. soc. 4 février 2016, n° 14-23663 D). Ces critères légaux sont cumulatifs.
Aussi, si l’un des critères manque, l’employeur ne peut pas prétendre que le salarié est un cadre dirigeant pour éviter d’avoir à payer un rappel de salaires pour heures supplémentaires.
Les juges saisis d’une contestation de la qualification ne doivent pas s’arrêter à celle donnée par les parties mais passer en revue l’ensemble des critères légaux. En cas de contentieux, le juge doit examiner la situation du salarié au regard des trois critères en question (cass. soc. 22 juin 2016, n° 14-29246, BC V n° 137).
En l’espèce, un salarié a été engagé le 2 avril 2012 en qualité de directeur d’établissement pour superviser deux cliniques.
Licencié le 9 mai 2017, il a saisi les juges pour obtenir un rappel de salaire notamment pour heures supplémentaires et congés payés afférents car il contestait la qualité de cadre dirigeant que lui opposait son employeur, sa rémunération ne faisant pas partie des rémunérations les plus élevées des sociétés du groupe.
Les juges du fond ont considéré que ses fonctions de directeur général d’une clinique et de gérant de l’autre établissement démontraient bien la qualité de cadre dirigeant, comme en attestaient d’ailleurs la mention expresse de cadre dirigeant dans son contrat de travail ainsi que des extraits K-bis des cliniques qu’il supervisait.
Ces deux fonctions impliquaient selon les juges d’Appel nécessairement une grande indépendance dans l’organisation de son temps de travail mais aussi le pouvoir de prendre des décisions importantes en matière d’embauche et de licenciement des salariés, dans une large autonomie.
Le salarié a alors saisi la Cour de cassation pour contester la décision d’appel.
La Solution : La Cour de cassation n’approuve pas les juges d’appel et infirme leur décision.
Elle rappelle la règle énoncée selon laquelle les critères pour être considéré cadre dirigeant sont cumulatifs.
Le fait d’occuper des fonctions dirigeantes et de disposer d’un large pouvoir de décision ne suffit pas pour être considéré comme cadre dirigeant.
Encore faut-il disposer d’une rémunération située dans les niveaux les plus élevés de l’entreprise ou du groupe.
Or les juges n’avaient pas recherché si la rémunération effectivement perçue par le salarié se situait dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués au sein du groupement. Ils ne pouvaient sans l’avoir vérifié au préalable donc pas attribuer au salarié le statut de cadre dirigeant.
L’affaire est donc renvoyée à nouveau devant la cour d’appel qui devra vérifier ce point.
En Conclusion, un salarié privé d’heures supplémentaires peut toujours contester la qualité de cadre dirigeant. L’avantage, s’il y parvient, est que l’employeur n’a aucunement contrôlé ses temps de travail et sa charge d’activité. Le risque d’une condamnation de l’employeur au paiement d’heures supplémentaires sur la foi de ses décomptes d’heure, voir d’une indemnité pour travail dissimulé partiellement est particulièrement important.